2312, de Kim Stanley Robinson (SF)

Kim Stanley Robinson
2312

New York, Orbit, 2012, 576 p.

Robinson_2312Robinson est un amoureux du système solaire. La plupart de ses romans de science-fiction s’attachent à nous faire voyager dans des futurs où l’humanité occupe les autres mondes qui gravitent autour du Soleil. C’était le cas dans Icehenge, The Memory of Whiteness ou sa mémorable trilogie martienne, et c’est encore le cas dans 2312, le titre servant à dater les événements du livre. Cette fois, c’est tout le système solaire qui sert de cadre à l’intrigue. Le personnage principal, Swan Er Hong, est l’héritière de la principale dirigeante de la colonie humaine sur Mercure. La mort subite de sa grand-mère précipite Swan – qui a cent trente-sept ans bien comptés – dans une série de voyages interplanétaires qui lui révèlent certaines des entreprises secrètes de son aïeule.

Grand admirateur de Marcel Proust, l’auteur s’intéresse autant au complot qui semble impliquer des intelligences artificielles dotées de corps humanoïdes et d’une autonomie sans précédent qu’au cheminement psychologique de Swan. Comment réagit-on quand la vie s’allonge et que le spectre de la mort recule ? L’amour et le mariage ne sont-ils plus que des illusions agréables ? Quelles sont les limites des transformations du corps et de ses commensaux microbiens quand la bisexualité devient gage de longévité et qu’il est possible de s’implanter des neurones d’oiseaux ou d’ingérer des micro-organismes originaires de l’océan de la lune Encelade ? Robinson imagine un futur post-humain à plusieurs égards, mais qui reste en deçà de la transcendance d’une hypothétique Singularité : ses personnages demeurent compréhensibles quoiqu’étrangers.

Comme dans la trilogie martienne, Robinson s’ingénie à rendre plausibles la terraformation de planètes comme Mars et Vénus, voire de la lune Titan, et la conversion d’astéroïdes en habitats miniatures qui servent d’arches spatiales aux espèces animales et végétales plus ou moins disparues des paysages de la Terre. Nourrie de références littéraires et musicales, la narration adopte un ton élégiaque. Quelques péripéties relancent l’intérêt, de la visite d’une base sur Io à la quasi-destruction d’une ville mobile sur Mercure, mais l’auteur ne cherche pas à signer une histoire palpitante. La science-fiction se marie ici à des réflexions philosophiques et à des méditations sur la condition (post-)humaine.

L’ouvrage tire profit de l’exploration humaine du système solaire depuis cinquante ans pour proposer aux amateurs de science-fiction pure et dure une vision à la fois humaniste, technique et scientifique d’un futur possible.

Jean-Louis TRUDEL

 

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