Pierrette Beauchamp, Voyageurs de passages : Tôt ou tard (SF)

À mi-chemin entre le roman historique, la saga familiale et le roman de science-fiction, Tôt ou tard est le premier tome d’une série consacrée à des voyages dans l’histoire montréalaise (et québécoise) du XXe siècle. Le roman débute en septembre 2000. Stéphane Gadbois loge dans la maison familiale de son ami Patrice Bilodeau, chercheur médical parti à l’étranger, qui a prêté sa demeure pour que Stéphane termine la rédaction d’un mémoire de maîtrise en histoire dans le cadre d’un retour tardif aux études. À l’aube de la quarantaine, Stéphane a rompu avec sa femme et cherche un sens à sa vie. L’irruption d’une jeune femme dans le sous-sol de la maison va faire basculer son existence. Janine Provencher affirme avoir fui un incendie dans un édifice voisin au moyen d’un souterrain, mais l’incendie en question a eu lieu en 1959…

Beauchamp ne se prive pas d’exploiter le décalage entre le Québec d’avant la Révolution tranquille et celui de l’an 2000. Si l’idée de base peut rappeler la série Les Rescapés de Radio-Canada, l’intrigue s’intéresse aussi aux relations complexes qui unissent Stéphane et Janine. Cette dernière est en fait la mère de Patrice, ami d’enfance de Stéphane, et celui-ci a connu Janine sous les traits d’une mère dans la trentaine durant les années soixante-dix. Stéphane, qui a eu une enfance malheureuse, s’était d’ailleurs pris d’affection pour Janine, qu’il préférait à sa propre mère. Une nouvelle relation se tisse désormais entre Stéphane, l’adulte de l’an 2000, et Janine, la jeune femme de 1959, qu’il apprend à aimer tandis qu’ils s’efforcent d’élucider ensemble le mystère de cet incompréhensible déplacement temporel. Des souvenirs d’enfance et des secrets de famille tournent autour du puits creusé dans le sous-sol de la maison des familles Provencher et Bilodeau, et des galeries souterraines qui communiquent avec ce puits. Ce premier volume s’achève d’ailleurs sur un nouveau voyage dans le temps, qui permet à Stéphane et Janine d’accéder à un passé encore plus éloigné.

Si le style est relativement simple et terre-à-terre, la narration de Beauchamp se montre alerte et confère beaucoup d’humanité aux personnages principaux. Tout en mettant un certain temps à comprendre ce qui se passe, Stéphane et Janine ne se perdent pas en conjectures inutiles, grâce aux liens qui les rapprochent. Alors que le roman semblait esquisser la relation d’une histoire d’amour contrariée par un décalage dans le temps et la différence des âges, les choses se compliquent lorsque les protagonistes se rendent compte de l’existence d’un véritable réseau de tunnels qui quadrillent non seulement le sous-sol du quartier Rosemont mais toutes les époques du XXe siècle. Cet ultime rebondissement relance donc l’intérêt en prévision du deuxième tome, qui pourrait du coup verser un peu plus franchement dans l’aventure de science-fiction.

Jean-Louis TRUDEL

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