Joël Champetier, Le Mystère des Sylvaneaux (Fy)

Joël Champetier

Le Mystère des Sylvaneaux

Lévis, Alire (Romans 129), 2009, 528 p.

Joël Champetier nous convie encore une fois dans l’univers des Sylvaneaux, ces créatures qu’on a crues longtemps disparues. Ce roman constitue une réécriture enrichie de quatre volumes publiés antérieurement. Je n’ai pas lu tous ces livres et ne peux donc juger à quel point ces changements sont majeurs, mais on peut constater que le produit fini reflète une unité indiscutable. Rappelons que l’histoire se situe à une époque lointaine, dans un pays prospère au centre duquel se dresse Contremont, où habite le roi Japier.

La première partie est consacrée à Barrad, dernier survivant des Aggs, sortes d’ogres qui se nourrissent de chair humaine. Il détient Melsi, la fille du roi, en otage et ne la libérera qu’en échange d’un Sylvaneau. La relation entre la fillette et le géant revêt un grand intérêt, la haine et la peur cédant graduellement le pas à la compréhension, au dialogue et à l’empathie. En général, les personnages de Champetier se distinguent par leurs nuances qui compensent leurs excès et leur donnent un profil psychologique intéressant. Une délégation nommée par le roi et composée entre autres de Sirokin, son conseiller, et Nestorien, un jeune page, part pour un long parcours semé d’embûches dont elle reviendra avec une Sylvanelle nommée Diarmuid. Après avoir bu le sang de cette dernière, Barrad mourra et les hommes du roi devront par la suite la ramener dans son pays. Ce deuxième voyage, plus périlleux encore que le premier, leur permettra de percer le mystère des Sylvaneaux.

Les rapports conflictuels prennent de plus en plus de place au fur et à mesure que le récit avance. Ils renforcent la réflexion sur le pouvoir et la tolérance ainsi que la difficulté d’accepter l’autre, laquelle se manifeste autant du côté des humains que de celui des Sylvaneaux. Ces derniers affichent une certaine supériorité face aux premiers, allant jusqu’à emprisonner les membres de la délégation qui ont pourtant ramené Diarmuid chez elle et qui se retrouvent au milieu d’une guerre. Il est intéressant de constater que ce sont les personnages marginaux comme Nestorien et Fafaro (une jeune guide rencontrée durant le premier voyage et qui tombe amoureux de Nestorien) qui s’avèrent le plus influents à travers leurs quêtes. Il vaut la peine de mentionner des intrigues qui renforcent le rythme du roman, par exemple lorsque Nestorien et Fafaro sont séparés lors d’une tempête en mer et que cette dernière est recueillie par un navire dont le capitaine deviendra amoureux d’elle. Par ailleurs, la formule du long roman contribue peut-être à donner de l’épaisseur psychologique aux personnages qui ont plus de temps pour évoluer. La relation de complicité qui s’instaure entre Melsi et Fafaro s’avère déterminante du fait qu’elle permet à la jeune princesse de prendre plus de maturité.

Bref, on n’a pas l’impression de perdre son temps en lisant ce livre qui nous touche de plusieurs façons. L’auteur aura bien redéfini le conte merveilleux tout en se distanciant des clichés inhérents à ce dernier. Et les réflexions qui en découlent demeurent actuelles et tournent notamment autour des guerres et des amours difficiles. Il aura su relever le défi de faire rêver tout en faisant réfléchir. Les Sylvaneaux feront-ils l’objet d’un autre roman ? Qui sait !

Martin THISDALE

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