Yves Meynard, The Book of Knights (Fy)

Yves Meynard

The Book of Knights

New York, Tor Books, 1998, 222 p.

Quand on se retrouve avec, entre les mains, un roman d’Yves Meynard pour adultes, on ressent à priori un peu plus d’excitation que dans le cas de n’importe quel autre bouquin. On place la barre haute, après s’être régalé des nouvelles de cet auteur. On attend avec impatience le moment propice et l’environnement adéquat pour commencer le premier chapitre…

Au début, on se dit : « tiens, c’est intéressant comme mise en place ». Ce n’est pas l’euphorie immédiate ; peut-être qu’on avait trop d’attentes, tout simplement. On poursuit la lecture.

En quelques pages, on découvre petit à petit le quotidien d’un jeune orphelin nommé Adelrune, élevé par des parents adoptifs sévères, obsédés par l’obéissance à la Règle – une religion fort stricte et contraignante. Un jour, le garçon trouve un vieux livre – le Livre des Chevaliers – dans le grenier. Adelrune ne sait pas lire, mais les images le fascinent. Bientôt, il décidera d’apprendre à déchiffrer les symboles sur le papier afin de savoir quelles histoires sont dépeintes par ces images, devenant un élève studieux, emplissant d’espoir ses parents adoptifs.

Pour aussitôt les décevoir. Car à travers le livre, dont Adelrune ne met jamais en doute les histoires, le garçon devine un monde passionnant et vaste, au-delà des frontières de son village natal. Il décide donc de partir à la recherche de Riandor, celui qui peut lui apprendre à devenir chevalier.

Adelrune trouvera sans problème son mentor, obtiendra auprès de lui la formation nécessaire à un bon chevalier. Ensuite viendra le moment du test, prouvant qu’il mérite d’être adoubé – c’est-à-dire le moment des aventures de par le monde.

Une histoire de fantastique épique pas mal classique. C’est là ma première déception. Encore une histoire de chevalier, de magie, de princesse et de roi, de puissances surnaturelles et de guerres ! Je m’attendais à autre chose d’Yves Meynard. Mais comme, justement, je m’attends à mieux, je n’abandonne pas la lecture. Je me dis qu’il est impossible de perdre son temps en lisant du Meynard et que forcément, quelque chose interviendra dans l’histoire pour l’élever au-dessus de la masse. Sans doute au prochain chapitre. Et les chapitres s’enfilent…

Parvenue à la moitié de The Book of Knights, mon idée est faite : Yves Meynard a l’habitude d’écrire des nouvelles et c’est, grosso modo, ce qu’il nous sert dans ce roman. Des chapitres qui sont de petites histoires en elles-mêmes et dont chacune fait avancer l’Histoire globale, mais un peu à la façon d’un jeu de rôles (pensai-je en me souvenant qu’Yves Meynard a été grand amateur de ces jeux), soit dans un ordre apparemment aléatoire.

La rencontre et le sauvetage de la progéniture de Kuzar, son amitié avec les sorcières du Vlae Dhras, sa mésaventure avec les bêtes fantastiques des steppes, la guerre contre Ossué à bord du bateau-pays et les cadeaux qu’il gagne à vaincre les obstacles – tout cela ressemble à une accumulation d’aventures pour un héros de jeu de rôles, destinée à nous démontrer l’ingéniosité, la force et le courage d’Adelrune. Une fois qu’une aventure est terminée, elle ne semble pas tellement avoir de répercussion sur les suivantes.

C’est ici que je lève mon chapeau à Yves Meynard, pour m’avoir menée en bateau tout le long. The Book of Knights, ce n’est pas un roman ; c’est un long tour de magie.

Car à partir de la moitié du roman, l’impression du lecteur se renverse. Tout à coup, on regrette de ne pas avoir porté un peu plus d’attention aux détails qui paraissaient tellement anodins, dans les chapitres précédents. Tout à coup, chaque détail se met en place pour enfin dessiner le vrai portrait de l’Histoire globale – qu’on ne soupçonnait pas, il va sans dire. Jusqu’à la confrontation finale, on va de surprise en surprise et c’est à ce moment précis qu’on ne peut plus lâcher le livre des yeux, qu’on tombe sous le charme du magicien et qu’on se demande : « mais comment diable a-t-il fait ça !? ».

Un tour de force. The Book of Knights, mais un gros pari, aussi. Parce que si ça n’avait pas été Yves Meynard, si je n’avais pas été convaincue qu’il lui était impossible d’écrire quelque chose de banal, j’aurais peut-être abandonné ma lecture avant la fin. Alors je n’aurais rien vu du tour de magie et tout ce que j’aurais trouvé à dire de ce roman, ç’aurait été quelque chose du genre : « c’est très bien écrit, mais c’est encore un récit d’aventure mettant en scène un adolescent aspirant-chevalier, un sage mentor et un roi fou, en plus d’une panoplie de bibittes bizarres ».

Tandis que maintenant, je ne taris pas d’éloges sur ce chef-d’œuvre et ne garde qu’une réserve – minime. Cet Adelrune, quel naïf, tout de même ! Mais bien sûr, ce n’est qu’un enfant… Même si on finit par l’oublier.

Julie MARTEL

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