Jacques Foucher, Les Secrets de l’ultra-sonde (SF)

Jacques Foucher
Les Secrets de l’ultra-sonde
Montréal, Boréal (Boréal lnter #19), 1992, 173 p.
« Nous devons les semer. Dis donc, Mathieu, je t’ai vu protéger ta mère, tout à l’heure. Même un garde du corps bien entraîné n’aurait pu faire mieux ! Mais qu’est-ce que je vois ? Tu es blessé au bras gauche ? On dirait que tu saignes… »
— Ça n’a pas d’allure, dit Dominic. Personne ne parle comme ça dans la vraie vie !
Dominic, c’est le fils de ma blonde. Il aime bien lire par-dessus mon épaule quand j’étudie un livre destiné aux jeunes de son âge. Amusé, je lui ai lu la réplique suivante à haute voix : « Montre-moi ça quand même, ordonna Lisa-Ève en retroussant la manche de sa chemise sport. Ouf ! Tu as eu de la chance… »
— Ce n’est qu’une égratignure, a parié Dominic.
— Attends voir. Oui, « ce n’est qu’une égratignure », tu as raison.
— T’es pas sérieux ? Je disais ça à la blague ! Qui a écrit ça ?
— Le directeur des services juridiques de Châteauguay. Il s’est lancé en littérature jeunesse.
— Pourquoi ?
Pourquoi, en effet. La quatrième de couverture compare le livre aux œuvres de Jules Verne mais, en fait, le roman s’apparente beaucoup plus à un film comme L’Arme fatale 2, où personne ne se soucie de la qualité d’écriture, le public n’étant pas censé s’y connaître de toute façon. Une invention menace certains criminels ? Faites sauter le laboratoire ! Les personnages-clés se sont enfuis à la campagne ? Lâchez un missile sur leur chalet ! Ils se sont réfugiés dans la forêt ? Passez celle-ci au gaz toxique ! Et lorsqu’en bout de ligne les terroristes penseront à recourir à un enlèvement (fort peu crédible au demeurant), tous les problèmes seront résolus grâce à la prise en charge du dossier par l’Armée – après tout, nous annonce Mathieu, « l’ultra-sonde doit d’abord servir la meilleure des causes, c’est à dire la nôtre. Le reste n’a pas vraiment d’importance. » Tout est bien qui finit bien !
C’est tout. Il n’y a rien de plus substantiel dans ce texte tape-à-l’œil. Pour s’en convaincre, il suffit de lire la façon dont Foucher décrit l’héroïne en détresse, quelques minutes à peine après le brutal assassinat de son mari : « Le chagrin n’empêchait pas ses yeux bruns de briller dans un visage sensuel, les rendant un peu plus mystérieux. Ses lèvres étaient roses et luisantes […] Elle portait un chemisier jaune, presque transparent, qui laissait entrevoir ses formes parfaites. »
Et que dire des gros sabots de son fils quand il moralise : « Lorsque j’aurai passé [sic] sur cette planète, j’espère que la vie sera en meilleur état que lorsque j’y suis arrivé ! » Est-ce vraiment le même garçon qui s’écriait « Je le vengerai, je te le jure » quelques pages plus tôt ?
Avant de nous faire la leçon, l’auteur aurait dû examiner son propre discours…

Charles MONTPETIT

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