Fabrice Papillon, Alienés (SF)

Fabrice Papillon

Alienés

Paris, Plon, 2022, 512 p.

À Lyon, un cadavre est retrouvé dans une série de tunnels datant de l’Antiquité. Détail troublant, il aurait vraisemblablement explosé de l’intérieur. Au même moment, un autre individu est mort de la même manière… à bord de la Station spatiale internationale. Louise Vernay, commissaire stagiaire à la police de Lyon, est chargée de l’enquête sur le premier meurtre mais, dans son esprit, rapidement, des liens se tissent autour de l’autre décès. Opiniâtre, n’ayant pas la langue dans sa poche et prête à tout pour découvrir la vérité cachée derrière ces deux morts inexplicables, Louise va foncer et croiser en route un astronaute, Ethan Miller, qui fera équipe avec elle pour tenter de comprendre l’incompréhensible.

Ce livre est avant tout un thriller avec des éléments de science-fiction, mais attention, ici, on penche plus du côté science que du côté fiction. En bonne partie parce que l’intrigue a lieu aujourd’hui, dans un monde post-covid, et se déroule en mai-juin 2022. Ce qui m’a donné l’étrange privilège de lire le roman presque en temps réel ! Tous les éléments de l’intrigue qui se raccrochent au côté scientifique sont certes plausibles, mais entremêlés dans une intrigue qui part tellement dans tous les sens que l’on finit par vraiment se demander où ça va finir. Les théories du complot côtoient les écrits bibliques, Elon Musk et Raël font une apparition et les GAFAM ont une place autant que la monarchie britannique… Bref, un joyeux mélange pas toujours réaliste, mais qui trace un bilan des travers de notre société.

Louise Vernay est un personnage féminin atypique, et c’est plaisant à voir. Sans manière au point d’être rustre, décidée à rester sur le plancher des vaches à courir les criminels plutôt que derrière un bureau, fumeuse de cannabis invétérée, accro aux séries criminelles et peu soucieuse de son apparence, elle n’est pas une flic archétypale. Certes, elle traîne des pensées noires dans son placard, mais ça fait partie de son personnage et de ce qu’elle est. Élément que j’ai apprécié, elle est tout du long beaucoup plus décrite par sa personnalité que par son physique. À un certain moment, ses comportements semblent incohérents avec son caractère, mais vers la fin du livre on comprend pourquoi, et ces comportements sont alors totalement justifiés par l’intrigue. Disons que l’absence d’accent sur le deuxième e du titre n’est pas anodine.

L’autre protagoniste, Ethan Miller, est un personnage aux multiples couches, qu’on ne peut pas vraiment comprendre avant la toute fin. Au départ présenté comme un astronaute carriériste ultra-compétent, son image se trouble au fil de l’intrigue alors que se dévoilent des pans entiers de sa vie et qu’une tout autre vision nous apparaît de lui. À l’image de son grand-oncle Henry Miller (rien de moins !), il s’avère bien plus complexe et, ce faisant, insaisissable. Le simple fait que sa route croise celle de Louise Vernay est en soi tiré par les cheveux, mais les aventures dans lesquelles ils s’embarquent flirtent bien souvent avec le totalement invraisemblable. Sauf que… la fin de l’intrigue justifie totalement ces retournements. Et qu’au final, ça marche.

L’auteur a montré une grande maîtrise dans sa façon de mener son intrigue tambour battant. On est ici dans un thriller à la Da Vinci Code, sans temps mort, où bien des éléments symboliques, voire carrément du domaine de l’ésotérique, viennent se mêler à d’autres qui eux sont tout à fait réalistes et même normaux de notre époque. Tout ceci dans une intrigue où l’on écarquille parfois les yeux devant les événements, mais qu’on est incapable de lâcher.

Bref, un livre à placer dans les mains des amateurs de thriller et qui tient de la science-fiction un peu par la peur, mais qui dans son genre principal remplit parfaitement son mandat : nous faire tourner les pages sans arrêt parce qu’on veut savoir comment ça va finir !

Mariane CAYER

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