Collectif, Dix ans d’éternité (Hy)

Collectif

Dix ans d’éternité : anthologie

Sherbrooke, Brins d’éternité/Les Six Brumes (Brumes de légende 002), 2014, 383 pages.

L’automne 2014 est à marquer d’une pierre blanche, car il y a longtemps, me semble-t-il, qu’on a vu paraître des ouvrages offrant un aussi complet portrait de la SFFQ (à part le DALIAF, bien sûr, mais disons que ça ne se compare pas). Il y a eu le Solaris 40e anniversaire d’abord, puis cette anthologie qui marque le dixième anniversaire de Brins d’éternité. Ce très beau bouquin – bravo pour l’idée d’y insérer des couvertures couleurs, c’est magnifique ! – propose une vingtaine de textes de qualité sur des thèmes variés. Si on ne peut limiter cet ouvrage à une étiquette « anthologie de la relève », puisque plusieurs écrivains professionnels y participent, il reste que la majorité des textes provient d’auteurs qui ont émergé durant la dernière décennie… et comme il est plaisant de constater la qualité d’imaginaire et d’écriture de ces auteurs « émergents » !

Bon, les infos techniques d’abord : la vingtaine de fictions est précédée de deux préfaces, la première de l’éditeur fondateur, Mathieu Fortin, la seconde de l’éditeur actuel, Guillaume Voisine, puis éclairée, en fin de volume, par une postface de Claude Janelle qui vient donner à Brins d’éternité la place qu’elle mérite dans l’univers de la SFFQ.

Les présentations des éditeurs passé et actuel sont intéressantes pour qui, comme moi, ne connaît pas bien l’histoire de la revue. La postface de Claude Janelle vient asseoir la crédibilité de Brins d’éternité et oblige l’innocent en mon genre à mesurer l’importance prise par ce lieu de publication qui, hier encore, était si neuf…

Là, c’est le moment du couplet nostalgique : les amis, quel coup de vieux ai-je pris à la lecture de cette anthologie ! Moi qui fus en mon temps membre de la relève, voici que mes yeux se dessillent. C’est un peu comme si, étant entrée dans une pièce qui me semblait trop vaste et trop vide, je m’étais retournée pour découvrir, près de l’entrée, une véritable multitude en train de s’installer ! Je ne vais pas me plaindre de ce coup de vieux, car la sensation de pérennité est enivrante.

Je me souviens, en 1984, des préparatifs pour le numéro dixième anniversaire de Solaris. On était alors plus jeunes, plus minces (à part Joël, bien entendu). Et, en 1994, l’antho du 20e anniversaire me semblait le meilleur des portraits de la SFFQ. Ça l’était. Pour l’époque. Ça le restera toujours. Mais il s’est ajouté combien de dignes représentants de nos littératures de l’imaginaire, maintenant ? Sans compter que, dans le temps, on prétendait à la blague que j’étais « la » relève féminine en SF… Le moins qu’on puisse dire, aujourd’hui, c’est que la situation a changé…

Car là où j’ai été le plus surprise, c’est par la quantité de textes de science-fiction, une bonne douzaine sur les vingt nouvelles de l’anthologie. Et de la bonne SF ! Les textes de fantastique, et les « inclassables », je m’y attendais : le fantastique a toujours occupé une grande place dans l’imaginaire collectif. Mais la SF… ne la dit-on pas sur le déclin ? Mon œil, oui !

Ah, je m’étais promis de ne pas m’embarquer dans un commentaire détaillé de chaque histoire. Si certaines m’ont laissée plutôt indifférente, les nouvelles qui ont soulevé mon enthousiasme sont nombreuses… Bon, j’y vais de mes coups de cœur, d’abord chez nos « espoirs » : « Kamouraska perdu » d’Alain Ducharme m’a envoûtée. Dans « L’Enrouleur de temps » de Geneviève Blouin, la conclusion a chamboulé toute ma perception du texte, bravo ! La « Renaissance » de Pascale Raud, un texte que j’ai trouvé beau et poignant, a soulevé cette question/clin d’œil : le paradis de l’écrivain est-il donc… une bibliothèque ? « Le Talent d’Ati » de Dave Côté : désolée pour le jeu de mots, mais ça montre le talent de l’auteur. Enfin, « Du haut des toits immaculés » de Carl Rocheleau m’a fait m’exclamer « wow » !

On ne s’étonnera pas de la qualité des textes des vieux croûtons de ma génération, mais permettez-moi quand même de m’étonner d’avoir été surprise lors d’une promenade sur « Les Terrasses de Bréra » où nous entraîne Jean-Louis Trudel. J’en suis encore bouche bée ! Et je dois absolument citer « Home sweet home » de Claude Bolduc, car c’est la feel good story de l’anthologie. Je souris encore au souvenir de cette lecture…

J’ai passé de beaux moments à lire Dix ans d’éternité et je n’hésiterai pas une seconde à recommander le bouquin à quiconque souhaiterait découvrir nos littératures de l’imaginaire.

Décidément, les années qui se terminent en « 4 » seront toujours marquantes dans l’univers toujours renouvelé de la SFFQ !

Francine PELLETIER

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